Face aux incertitudes liées aux tarifs douaniers imposés par les Etats-Unis à ses partenaires commerciaux et aux réponses des uns et des autres, les marchés des matières premières sont attentistes.
Blé et maïs sous les 200 €/t mi-avril
Début avril, le cours du blé en France reste sous 200 €/t, niveau autour duquel il oscille depuis deux ans. Le maïs suit la même évolution. Le blé disponible Eure-et-Loir affiche ainsi 193 €/t le 10 avril et le maïs est à 187 €/t.

Pour la récolte 2025, selon Agreste, « la sole de blé tendre en 2025 est estimée à 4,63 Mha, en hausse de 10 % par rapport au point bas de 2024, mais à peine au-dessus de la moyenne 2020-2024 ». Les conditions de culture sont ne sont pas optimales partout. Après des précipitations importantes en début d’année suivies d’une période plus sèche, le retour de la pluie mi-avril était attendu. La récolte s’annonce sous de meilleurs auspices qu’en 2024 à la même période. Si le cours du blé européen sera probablement peu affecté par la politique douanière de Donald Trump, la fermeture du marché algérien est un coup dur pour la filière française. Cette dernière a déjà souffert du faible disponible exportable sur la campagne 2024/2025. À cela s’ajoute la hausse de la parité euro/dollar qui entraine un manque de compétitivité de l’origine française à l’export.
La production mondiale de blé pour la campagne 2025/2026 est estimée à 806 millions de tonnes (+1% /campagne 2024/2025) par le conseil international des grains (IGC). Côté échanges mondiaux de blé, l’USDA prévoit des exports en recul de 7% sur la campagne 2024/2025 par rapport à la précédente. Dans un contexte, à date, d’absence de tension sur l’offre les cours du blé restent stables.
Pour le maïs, la production mondiale pour la campagne 2025/2026 serait en hausse par rapport à la précédente. Les semis sont en cours dans l’hémisphère Nord et se déroulent a priori dans de bonnes conditions. La demande dynamique, notamment pour le bioéthanol, pourrait soutenir les cours.
Les cours des tourteaux de soja et de colza poursuivent leur baisse
Le cours du tourteau de soja à Montoir poursuit sa baisse, à 358 €/T en avril 2025, soit 17% de moins que la même semaine en 2024. Un peu plus stable sur un an, le tourteau de colza à Montoir est à 303 €/t à la même date (+2% /2024).

Selon le dernier Infos Rapides d’Agreste, « les surfaces cultivées de colza en France en 2025 seraient supérieures de 7,4 % à la moyenne des cinq années précédentes malgré une baisse de 3,0 % sur un an. Le développement des cultures est globalement satisfaisant, avec des conditions sèches qui limitent l’apparition de maladies ».
Valse des droits de douane : le soja le plus exposé
La surenchère des tarifs douaniers imposés par les États-Unis ces dernières semaines et les réponses (ou non) des pays concernés font planer de nombreuses incertitudes sur l’évolution des cours dans les semaines et mois à venir. Les enjeux sont différents selon les matières premières, des mesures de rétorsion de la part de l’UE pourraient faire monter les prix :
- Le blé est peu exposé pour les éleveurs français : les États-Unis exportent toujours mais à un niveau bien moindre à celui d’il y a 10 ans et l’Europe ne s’approvisionne pas ou peu auprès des USA. Les répercussions sur le prix du blé devraient être limitées.
- Pour le maïs, les choses sont différentes. Si l’Europe importe peu de maïs directement des États-Unis, le prix de ses imports d’autres provenances est influencé par les cours du maïs étasunien. Deux scénarios pourraient se produire : la perte des débouchés à l’export pourrait faire baisser les prix aux USA, ce qui se répercuterait sur les cours UE ; ou une tension sur l’offre mondiale en maïs suite à l’absence de maïs étasunien sur les marchés pourrait faire monter les prix.
- Concernant le soja, les USA sont un acteur important de la production et de l’export. Si l’Union européenne décidait de riposter aux droits de douane imposés par Donald Trump, cela entrainerait une hausse du prix du soja ou un report des achats sur d’autres pays producteurs et de tensions.
À visionner sur ce sujet, la vidéo de l’IFIP, consultable ici.
En complément de ces éléments, le différend qui oppose le Canada et la Chine pèse sur le cours du canola canadien et pourrait mettre la pression sur les prix du colza européen.
Compte tenu des incertitudes géopolitiques et des conflits commerciaux nombreux, l’OMC a revu mi-avril ses prévisions annuelles à la baisse concernant le commerce mondial : « basé sur les mesures en place au 14 avril, y compris la suspension des tarifs douaniers réciproques, le volume de marchandises échangées en 2025 est estimé en recul de 0,2%. » Cette nouvelle estimation est inférieure de près de 3 points à son niveau estimé sans les derniers changements de politique douaniers. « Elle marque un tournant significatif par rapport au début d’année, quand les économistes de l’OMC s’attendaient à une progression continue du commerce, soutenue par un contexte macroéconomique amélioré », ajoute l’OMC. Les céréales sont bien sûr concernées par ce recul des échanges.
Symbole des craintes des investisseurs, l’or, valeur refuge, a atteint des sommets début avril avant de se détendre lorsque Donald Trump a annoncé suspendre les droits « réciproques ». Un nième revirement.
L’IPAMPA aliments achetés baisse lentement
À 122,1 en février 2025 (base 100=2020), l’IPAMPA aliments achetés lait de vache (indice des prix d’achat des moyens de production agricole) est en retrait de 5,5% sur un an et de 0,2% sur un mois.

L’indice aliments achetés lait de vache revient ainsi à son niveau de janvier 2022, juste avant le début de la guerre en Ukraine et de l’explosion des prix des matières premières. C’est lié principalement au recul des cours des tourteaux.
Énergie : prix du pétrole en baisse, mais prix du gaz en hausse en Europe
Du côté du prix de l’énergie, le cours du pétrole s’est plutôt réduit au cours de l’année 2024 et début 2025, celui du gaz naturel en Europe était haussier sous la pression des tensions géopolitiques.

Le cours du pétrole est en baisse sur un an, à 73 $/bbl en mars 2025 (-15% /mars 2024) selon les données de la Banque Mondiale. Cette baisse est liée notamment à la décision des pays de l’Opep+ d’augmenter la production et à la contraction de l’économie mondiale. Le prix du gaz naturel en Europe a montré des signes de remontée sous l’effet des tensions géopolitiques, et, à 13 $/mmbtu en mars 2025, reste très supérieur à son niveau un an plus tôt (+55%) mais toujours très loin des 70 $ atteints en août 2022. Producteur et exportateur de gaz, les États-Unis bénéficient toujours d’un prix très bas de cette source d’énergie.