Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 360 Avril 2024
Viande ovine
La concurrence est forte sur le marché de l’agneau
Sur les deux premiers mois de 2024, les importations chinoises de viande ovine sont en hausse d’une année sur l’autre et, bien que la Nouvelle-Zélande reste son premier fournisseur en viande ovine avec plus de la moitié des parts de marché, ses envois vers ce géant asiatique sont en baisse.
L’Australie, plus compétitive, voit au contraire ses exports vers la Chine progresser sur la période. La Nouvelle-Zélande redirige alors ses flux vers le marché nord-américain mais aussi vers le Royaume-Uni et l’Union européenne. Sur le marché communautaire, l’Irlande joue des coudes mais la concurrence de l’Océanie et du Royaume-Uni semble trop forte.
L’offre française ne suffit pas à satisfaire les pics de demande
Le cours de l’agneau français a atteint un nouveau record pour la Pâques catholique, illustrant le manque d’agneaux alors que la demande, comme toujours dans le cadre de fêtes religieuses, était présente. Avec la fin du Ramadan, la Pâques juive puis l’Aïd en juin, le marché pourrait rester sous tension jusqu’à cet été.
Le cours dépasse les 9,50 €/kg entrée abattoir pour Pâques
En semaine 14 de 2024 (se terminant le 7 avril, une semaine après Pâques), la cotation atteignait 9,50 €/kg soit +1,08 €/kg comparée à la même semaine en 2023. La semaine précédente, soit celle de Pâques, le cours atteignait 9,54 €/kg, en hausse de +0,99 €/kg comparé au niveau de Pâques 2023. L’offre est restée modeste, entre sorties françaises et importations de vifs en recul, menant à ce niveau de prix entrée abattoir. Le marché devrait rester sous tension au moins jusqu’en juin, avec un possible relâchement en juillet-août. Malgré un prix de l’agneau en magasins qui atteint de nouveaux records, les consommateurs ont de nouveau répondu présents cette année pour les traditionnelles fêtes religieuses : début du Ramadan le 10 mars, puis Pâques catholique et fin du Ramadan. La Pâque juive du 22 au 30 avril et l’Aïd el-Kébir du 16 au 20 juin constitueront 2 nouveaux pics de demande. Certains distributeurs ont fait le choix de commander moins d’agneau français pour Pâques, vu son prix élevé, le substituant par d’autres produits, comme de la volaille, ou encore de l’agneau néozélandais, moins cher.
Très dépendant de l’indice des prix des carburants, l’IPAMPA ovin viande a poursuivi sa légère baisse amorcée fin 2022 et était en légère hausse d’un mois sur l’autre en février 2024. À 131,2, il est toutefois en repli de -5% /février 2023. L’indice énergie et lubrifiants augmentait de +6%/ janvier 2024 et était stable d’une année sur l’autre tandis que l’indice engrais était stable d’un mois sur l’autre mais reculait de -30%/2023. L’indice aliments achetés reculait quant à lui de -1% d’un mois sur l’autre et de -13% /2023. Malgré ces fluctuations, ces indices restent à des niveaux historiquement élevés.
Des abattages insuffisants pour satisfaire la demande durant les fêtes
Selon Agreste, la production abattue de viande ovine était en baisse de -4% d’une année sur l’autre sur les deux premiers mois de 2024 : les abattages de réformes ont baissé de -14% en têtes et en volumes, tout comme ceux d’agneaux, de façon moins accentuée (-2% en effectifs et en volumes). Les poids de carcasse des agneaux sont passés de 18,1 à 18,2 kgéc entre 2023 et 2024, et ceux des réformes ont légèrement progressé, passant de 26,1 à 26,3 kgéc. Au total, 10 400 téc de viande ovine ont été produites, soit -4% /2023 et -6% comparé à la moyenne des cinq dernières années (2019-2023). La production française se replie – baisse des sorties de Lacaune mais aussi des agneaux issus de la filière allaitante – et met le marché sous tension. Les abatteurs sont en forte concurrence pour acquérir des agneaux. Pour Pâques, les commandes ont une nouvelle fois été très tardives auprès des abatteurs, soulignant l’incertitude de ce marché, entre baisse de pouvoir d’achat des ménages et prix de l’agneau qui ne cesse de croître année après année.
Des erreurs dans les données douanières ne nous permettent pas d’apprécier de manière chiffrée l’évolution des importations d’agneaux vivants espagnols en ce début d’année 2024. Toutefois, d’après les professionnels, ceux-ci sont en baisse sur le marché français : chers et toujours orientés préférentiellement sur les pays-tiers, en particulier le Maroc, marché ouvert en 2023 et très attractif.
Les importations d’agneaux britanniques et néozélandais progressent
Sur les deux premiers mois de 2024, les importations françaises de viande ovine étaient stables d’une année sur l’autre, à 10 400 téc : la hausse de février (+4% /2023) a contrebalancé la baisse de janvier (-3%). En février, comme en janvier, seuls les achats de viande britannique et néozélandaise étaient en hausse. Sur deux mois, ils progressaient de +11% /2023 en provenance de Nouvelle-Zélande, +11% du Royaume-Uni, mais reculaient de -11% d’Irlande et de -6% d’Espagne.
Le disponible baisse toujours début 2024
Les abattages français sont en baisse tandis que les importations sont stables d’une année sur l’autre sur les deux premiers mois de 2024, ce qui affecte d’autant le disponible français : il diminue de -2% /2023 et demeure modeste, -7% sous la moyenne 2015-2019.
Viande ovine » UE et monde »
La filière britannique booste ses envois malgré une baisse de production
La production de viande ovine britannique est en nette baisse d’une année sur l’autre sur les deux premiers mois de l’année 2024. Ses exportations de viande ovine sont pourtant dynamiques. Le pays fait aussi face à un regain de sa consommation intérieure et c’est grâce à la nette augmentation de ses importations de viande ovine, en provenance de ses deux nouveaux partenaires océaniens, qu’il parvient à répondre présent.
Royaume-Uni : la cotation dépasse celle de l’agneau français
Le cours de l’agneau britannique a de nouveau augmenté au cours de la semaine se terminant le 7 avril, alors que l’offre restait tendue : en semaine 14, il se situait à 9,70 €/kg, soit +2,83 €/kg comparé à 2023 et +2,81 €/kg /2022. Les abattages pour la semaine de Pâques (semaine 13) étaient en repli de près de 15 000 têtes comparés à Pâques 2023. Selon AHDB, les agneaux présentés à l’abattoir sont de qualité variable en raison des conditions humides prolongées.
La production britannique de viande ovine a totalisé 68 000 t sur les trois premiers mois de 2024, en baisse de -5% d’une année sur l’autre, du fait d’une forte baisse en mars. Cela s’explique par un repli de -16% des abattages de réformes (-68 000 têtes) et de -5% des abattages d’agneaux (soit -140 000 têtes). Comparée à la moyenne 2015-2019, elle recule de -1%. Malgré une fête de Pâques un mois plus tôt cette année, les abattages de mars reculent nettement d’une année sur l’autre (-16% en volume).
Les importations de viande ovine ont par ailleurs continué de croître d’une année sur l’autre, illustrant toujours la mise en place des accords commerciaux avec la Nouvelle-Zélande et l’Australie (printemps 2023). Elles ont ainsi progressé de +53% /2023 sur 2 mois en 2024, à 10 200 téc, doublant en provenance de Nouvelle-Zélande et augmentant de +62% d’Australie mais reculant. Les volumes en provenance d’Irlande ont à l’inverse reculé de -6%, selon les douanes britanniques.
Avec une production qui était en hausse sur les deux premiers mois de l’année (de +2%/2023) et des importations dynamiques, les exportations britanniques de viande ovine ont bondi de +7% sur 2 mois en 2024 /2023. Elles ont progressé de +28% vers la France mais se sont repliées de -4% vers l’Allemagne. Elles dépassaient ainsi de +5% leur niveau d’avant Brexit et pandémie de Covid-19 (moyenne 2015-2019). En plus d’une bonne demande à l’export, les ventes intérieures d’agneau se redynamisent au Royaume-Uni, selon Kantar : sur les 12 premières semaines de 2024, elles augmentent de +5% /2023.
Les effectifs de femelles reproductrices en décembre 2023 s’élevaient à 13,8 millions de têtes, selon Defra. Il s’agit d’une baisse de -4 % (soit -615 000 têtes) par rapport à la même période en 2022 et donc du troupeau reproducteur le plus modeste depuis le début des relevés en 1996. La production d’agneaux pour la saison mars 2024-2025 est alors prévue en reculde -1,2%.
Irlande : les exportations baissent malgré une hausse de l’offre
En semaine 14 de 2024, la cotation du Hogget irlandais s’établissait à 9,0 €/kg, soit +2,05 €/kg au-dessus de son niveau de 2023, et +1,60 €/kg au-dessus de celui de 2022. Celle de l’agneau de nouvelle saison était de 9,55 €/kg la même semaine, soit 1,75 € /2023. Comme au Royaume-Uni, le manque d’offre face à une demande dynamique explique ce niveau de prix, en plus des cotations élevées chez les principaux clients de l’Irlande (France, Royaume-Uni, …).
Après avoir fléchi de -1% /2022 en 2023, les abattages d’ovins irlandais ont progressé de +1% /2023 sur les deux premiers mois de 2024. Les effectifs d’agneaux abattus ont légèrement progressé, de +3% /2023 et ceux des réformes reculé, de -8%. La production de viande ovine en volume a gagné +1%, à 10 800 téc, un niveau élevé en Irlande. Malgré cela, les exportations de viande ovine irlandaise se sont repliées en février 2024, de -20% / 2023, après un mois de janvier stable d’une année sur l’autre. Sur deux mois 2024, la baisse était de – 7% à 8 100 téc dont -7% vers la France mais +11% vers le Royaume-Uni (douanes irlandaises). La concurrence de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, mais aussi du Royaume-Uni, sur le marché européen, explique probablement cette baisse des envois irlandais. Les industriels stockent possiblement la viande ovine qu’ils ne parviennent à écouler.
Espagne : le cours se maintient légèrement au-dessus des 8 €/kg
Le cours de l’agneau espagnol oscille autour des 8,05 €/kg depuis plusieurs semaines, après avoir légèrement diminué en début d’année. En semaine 14, il s’établissait à 8,07 €/kg, soit + 0,83 €/kg, au-dessus de son niveau de 2023. Ce cours élevé illustre une offre toujours en repli.
Après une baisse de -11% entre 2022 et 2023, la production de viande ovine espagnole a poursuivi sa diminution début 2024 : en janvier, à 6 200 téc, elle reculait de -21% /2023. Le nombre d’agneaux abattus baissait de -14% et celui des réformes de -29%. Avec un disponible nettement diminué, la tendance baissière des exports de viande ovine comme de vifs se poursuit début 2024. Sur les deux premiers mois de 2024, les exportations de viande ovine espagnoles reculaient en effet de – 21% /2023, à 5 100 téc, principalement du fait d’un arrêt des envois vers Oman et d’une forte baisse vers les Émirats Arabe Unis (-84%) et la France (-14%). Sur la même période, les envois d’agneaux vivants ont nettement chuté, de -24% /2023 à 121 000 têtes, principalement via des fortes baisses vers le Portugal (-19 000 agneaux), la Jordanie (-14 000), la Hongrie (-13 000) et la Libye (-9 000). Parallèlement, les envois de réformes ont plus que doublé, atteignant 21 000 têtes.
Nouvelle-Zélande : des envois appuyés vers le Royaume-Uni et l’Amérique du Nord
Après avoir augmenté de +1% entre 2022 et 2023, la production ovine abattue en Nouvelle-Zélande a augmenté de +5% d’une année sur l’autre, à 96 900 t sur les deux premiers mois de 2024. Le nombre d’agneaux abattus a augmenté de +12%, à 4 M de têtes, tandis que celui des réformes a reculé de -13% à 842 000 têtes. La hausse des exportations de viande ovine est importante : +9% /2023, à 84 000 téc : la hausse de février (+20% /2023) a largement contrebalancé le recul de janvier (-2%). Sur ces deux mois, les envois néozélandais vers la Chine ont reculé (-11%), face à la compétitivité de l’Australie sur ce marché et la Nouvelle-Zélande a donc réorienté ses envois, notamment vers le Royaume-Uni (+43%) et l’Amérique du Nord (+50% vers les USA, +30% vers le Canada et x5 vers le Mexique).