Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 359 Mars 2024 Mise en ligne le 25/03/2024
Viande ovine
Afflux d’agneaux néozélandais et australiens sur le marché européen
Depuis la mise en application au printemps 2023 des accords de libre-échange entre le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande d’une part, et l’Australie d’autre part, le marché britannique subit une pression accrue de cette viande ovine compétitive. Les exportations britanniques augmentent alors d’autant vers l’UE à 27 et, début 2024, la baisse de demande chinoise conforte encore davantage cette redirection des flux océaniens vers le marché européen.
La filière manque d’agneaux pour les pics de commande du Ramadan et de Pâques
Le cours de l’agneau français a entamé sa traditionnelle hausse à l’approche du Ramadan et de Pâques. Il reste au-dessus du niveau des années précédentes car le disponible semble rester particulièrement modeste. Les agneaux manquent face aux commandes à honorer pour ces fêtes religieuses et les prix devraient atteindre des records pour le pic pascal.
Le cours dépasse les 9€/kg entrée abattoir à deux semaines de Pâques
En semaine 11 de 2024 (se terminant le 17 mars, à deux semaines de Pâques), la cotation a gagné +0,24 €/kg d’une semaine sur l’autre. À 9,07 €/kg, elle est en hausse de +0,99 €/kg /2023 et +1,39 €/kg /2022. À l’approche du Ramadan et de Pâques la demande tire le cours qui se raffermit de façon traditionnelle, et d’autant plus cette année vu le manque d’agneaux abattus en France et de viande importée. Pâques étant tôt et en dehors des vacances scolaires cette année, les professionnels s’attendent à une demande plutôt modérée.
Très dépendant de l’indice des prix des carburants, l’IPAMPA ovin viande a poursuivi sa légère baisse amorcée fin 2022 puis s’est stabilisé d’un mois sur l’autre en janvier 2024. À 131,2, il est toutefois en repli de -6% /janvier 2023. L’indice énergie et lubrifiants (-10% /2023 et -1% /2022), tout comme les indices engrais (-34% /2023 et -1%/2022) et aliments achetés (-13% /2023 et = /2022) reculent par rapport aux deux dernières années mais restent à des niveaux historiquement élevés.
L’alourdissement des agneaux supporte la production en janvier 2024
Selon Agreste, la production abattue de viande ovine était en hausse de +0,7% d’une année sur l’autre en janvier 2024 : malgré un repli des abattages de réformes (-11% en têtes, et -12% en volumes), la forte hausse du poids de carcasse des agneaux, passant de 17,8 à 18,5 kgéc entre janvier 2023 et 2024, a porté la production de ces derniers à +3,7% alors que la hausse des effectifs abattus reculait de – 0,4%. Au total, 5 080 téc de viande ovine ont été produites en janvier, soit +0,7% /2023. C’est cependant 6% de moins que la moyenne des cinq dernières années (janvier 2019-2023).
Les meilleures récoltes d’herbe en 2023 ont permis de mieux nourrir les animaux l’hiver 2023/2024, expliquant possiblement cette hausse des poids moyens de carcasse. En 2022, la sécheresse estivale avait en effet réduit les poids de carcasse. La baisse du prix des aliments, qui restent toutefois élevés, pourrait aussi avoir permis à certains éleveurs de complémenter davantage leurs agneaux.
Des erreurs dans les données douanières ne nous permettent pas d’apprécier l’évolution des importations d’agneaux vivants espagnols en ce début d’année 2024. Toutefois, vue la rareté et donc le prix élevé des agneaux espagnols, ce chiffre devrait être modeste pour janvier 2024.
Des importations en recul d’une année sur l’autre en janvier 2024
En janvier 2024, les importations françaises de viande ovine étaient en repli de -4% d’une année sur l’autre, à 4 600 téc, avec une nouvelle hausse des achats de viande britannique (+13% /2023) et néozélandaise (+18%) mais des importations en provenance d’Espagne (-13%) comme d’Irlande (- 17%) en recul.
Le disponible poursuit donc sur sa tendance baissière
Les abattages français sont en légère hausse tandis que les importations se replient, ce qui affecte d’autant le disponible français : en janvier 2024, il diminue de -2% /2023, à 10 700 téc, et demeure modeste, -9% sous la moyenne 2015-2019.
Viande ovine » UE et monde »
La baisse de l’offre face à une hausse de la demande fait bondir les cours en Europe
La production de viande ovine en Irlande comme au Royaume-Uni a débuté l’année à de bons niveaux en janvier mais a ensuite baissé alors que la demande, notamment à l’export, augmente graduellement à l’approche des fêtes religieuses : baisse de l’offre et hausse des commandes font ainsi grimper les cours. En Espagne, comme en France, ils sont également soutenus par une faiblesse de l’offre.
Royaume-Uni : flux de viande ovine dynamiques et cours qui s’emballent début 2024
Le cours britannique poursuit sa traditionnelle hausse bien au-dessus du niveau des années précédentes. En semaine 10, il se situait à 8,70 €/kg, soit +2,96 €/kg comparé à 2023 et +1,84 €/kg /2022.
La production britannique de viande ovine a totalisé 45 000 t sur les deux premiers mois de 2024, en hausse de +2% d’une année sur l’autre. Cela s’explique par une baisse de -9% des abattages de réformes (-26 000 têtes) contrebalancée par une hausse des abattages d’agneaux (+3% soit +48 000 têtes). Comparée à la moyenne 2015-2019, la production recule de -2%. Selon Defra, la production serait en baisse en février et la tendance se poursuivrait en mars, expliquant cette envolée de la cotation. Les importations de viande ovine ont continué de croître d’une année sur l’autre, poursuivant la dynamique entamée au 2nd semestre 2023 et illustrant bien la mise en place des accords commerciaux avec la Nouvelle-Zélande et l’Australie (printemps 2023). Elles ont ainsi progressé de +62% /2023 en janvier 2024, à 4 330 téc, triplant quasiment en provenance de Nouvelle-Zélande et augmentant de +36% d’Australie. Elles ont outre progressé de +8% depuis l’Irlande. Avec un disponible croissant, les exportations britanniques de viande ovine ont alors aussi poursuivi la même dynamique qu’au 2nd semestre 2023, bondissant de +14% en janvier 2024 /2023. Elles ont progressé de +38% vers la France mais se sont repliées de -8% vers l’Allemagne. Elles dépassaient ainsi de +4% leur niveau d’avant Brexit et pandémie de Covid-19 (moyenne 2015-2019).
Irlande : la demande s’accentue tandis que l’offre se replie
En semaine 10 de 2024, la cotation du Hogget irlandais s’établissait à 8,35 €/kg, soit +1,97 €/kg au-dessus de son niveau de 2023, et +1,35 €/kg au-dessus de celui de 2022.
Après avoir fléchi de -1% /2022 en 2023, les abattages d’ovins irlandais ont progressé de +2% /2023 en janvier. Les effectifs d’agneaux abattus ont légèrement progressé, de +5% /2023 et ceux des réformes reculé, de -13%. La production de viande ovine en volume a alors gagné +2%, à 5 800 téc : c’est le niveau le plus élevé enregistré depuis au moins 1982. Malgré cela, les exportations de viande ovine irlandaise étaient stables d’une année sur l’autre en janvier 2024, à 4 500 téc, avec – 6% vers la France mais +17% vers le Royaume-Uni. La demande d’agneau irlandais augmenterait à l’approche du Ramadan et de Pâques pour les principaux pays importateurs, tandis que l’offre irlandaise se serait contractée en février, faisant flamber les cours.
Espagne : repli de l’offre
Le cours de l’agneau espagnol est stable depuis plusieurs semaines, après avoir légèrement diminué en début d’année. En semaine 10, il s’établissait à 8,05 €/kg, soit + 0,94 €/kg, au-dessus de son niveau de 2023. Ce cours élevé illustre probablement une offre toujours en repli.
Du côté des exportations, la tendance se poursuit en janvier 2024 : baisse des envois de vifs comme de viande. En janvier 2024, les exportations de viande ovine espagnoles reculaient de – 7% /2023, à 2 500 téc, principalement du fait d’un important recul de la demande des pays du Moyen-Orient (Qatar, Bahreïn, …) et de la France (-16%). Sur la même période, les envois d’agneaux vivants ont nettement chuté, de -40% /2023 à 40 000 têtes, en raison de fortes baisses vers la Jordanie (-14 000 agneaux) et le Portugal (-15 000 agneaux). Parallèlement, les envois de réformes ont doublé, atteignant 11 500 têtes. Compte-tenu de la cotation soutenue et de la baisse des envois de viande et de vifs début 2024, on imagine que la production de viande ovine espagnole est restée modeste en début d’année. Pour rappel, la production espagnole avait déjà enregistré une forte baisse sur l’année 2003 : -11% /2022.
Nouvelle-Zélande : la baisse de demande chinoise réoriente les flux vers l’Europe début 2024
Après avoir augmenté de +1% entre 2022 et 2023, la production ovine abattue en Nouvelle-Zélande a augmenté de +4% d’une année sur l’autre en janvier, à 50 100 t. La hausse des exportations de viande ovine est moins importante : +1% /2023, à 39 000 téc, notamment du fait d’un recul de la demande chinoise (-13%). Elles augmentent donc vers l’Europe, avec +48% vers le Royaume-Uni et +8% vers la France. Malgré les conflits en Mer Rouge et la sécheresse qui frappe le canal du Panama depuis l’été dernier, et même si le trajet par voie maritime en est rallongé (d’une semaine en moyenne), cela ne semble pas impacter significativement les volumes néozélandais envoyés en Europe.