Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 329 Juin 2021 Mise en ligne le 15/06/2021

Lait de vache

Meilleur équilibre entre ressource laitière et demande de produits laitiers

Très bien orientés sur le 1er trimestre, les cours des ingrédients laitiers évoluent de manière contrastée depuis avril, notamment en Océanie.

Face à une demande internationale toujours ferme, le rétablissement progressif de la production laitière européenne améliore l’équilibre offre/demande d’autant que la production laitière demeure dynamique aux Etats-Unis et en Nouvelle-Zélande.

Sommaire du numéro 329
Lait de vache

Lait de vache » Collecte laitière »

Rétablissement en France et rebond dans l’UE-27

La collecte européenne enchaine un 2ème mois de croissance d’une année sur l’autre, tirée par la dynamique irlandaise et le redressement en France et en Allemagne. Les prix du lait ne connaissent pas de creux dans la plupart des pays soumis à une habituelle saisonnalité.

La collecte française se rétablit après avoir décroché cet hiver

En retrait marqué sur le début d’année (-2,6% sur le 1er trimestre), la collecte nationale se rapproche des niveaux plus habituels connus ces dernières années sur les mois printaniers. A près de 2,2 millions de tonnes sur avril selon l’enquête mensuelle de FranceAgriMer, elle dépasse de +0,7% son niveau d’avril 2020 et égale son niveau d’avril 2019. Sur mai, elle s’établirait en hausse de plus de 2% d’une année sur l’autre. Il convient toutefois de rappeler que la collecte sur avril et mai 2020 avait été contenue par les mesures d’incitation à la réduction de la collecte promues par le Cniel dans le contexte du 1er confinement.

Si la pousse de l’herbe n’a pas été des plus dynamiques sur ces deux mois marqués par une météo relativement fraîche (avec un manque de précipitation sur avril et des épisodes gélifs marqués), les naissances de veaux issus de mère laitière auraient été en forte croissance d’une année sur l’autre (+11% /avril 2020), permettant des entrées en lactation nombreuses. Au 1er mai, le cheptel de vaches laitières s’établit à un peu plus de 3,5 millions de têtes, en recul de 65 000 têtes d’une année sur l’autre (-1,8%), soit le repli le moins prononcé observé depuis septembre dernier. A titre de comparaison, le cheptel au 1er janvier accusait un repli de plus de 79 000 têtes (-2,2%).

Si les volumes n’ont pas été au rendez-vous partout sur les 1ères coupes, les conditions de récolte ont globalement été satisfaisantes permettant l’obtention d’une qualité de fourrages correcte.

Maintien des prix au pic de collecte

A 373 €/1 000 litres sur avril (+14 €/ avril 2020) selon l’enquête mensuelle laitière, le prix du lait résiste à l’habituelle baisse saisonnière qui accompagne le pic de collecte. Entre janvier et mars, il était passé de 380 € à 370 €/1 000 litres, se situant alors systèmatiquement 2 € en-dessous de son prix à pareille époque en 2020.
Ce rebond apparent du prix du lait attendu depuis quelques mois déjà alors que les coûts de production n’ont eu de cesse d’augmenter (Ipampa enchainant les points hauts historiques, à l’indice 110,4 en avril et mai) résulte de la bonne orientation des marchés des ingrédients laitiers (voir article suivant).

Prix France

Pas de creux saisonnier pour le prix du lait en Irlande, orientation haussière aux Pays-Bas

Si à l’instar de la France, l’Allemagne voit sa collecte se redresser timidement après un début d’année en retrait (-2% sur le 1er trimestre effet bissextile neutralisé), l’Irlande affiche de son côté une collecte toujours très dynamique à son pic saisonnier. Sur avril, en dépit de gelées fréquentes qui ont ralenti la pousse de l’herbe, la collecte s’est accrue de plus de 6% d’une année sur l’autre, à 1,07 million de tonnes, pour battre un nouveau record. Il faut souligner que les prix du lait se révèlent incitatifs, ne connaissant pas l’habituelle baisse saisonnière. A 368 €/t sur mai, le prix se situe près de 62 € au-dessus de son niveau de l’an passé à pareille époque, à des niveaux comparables à ceux observés en mai 2013 et 2014 (362 et 371 €/t).

Prix Irlande

Avec une dynamique de collecte retrouvée (+1,9% sur avril /2020, à 1,07 MT), les producteurs polonais échappent eux aussi à l’habituelle baisse saisonnière du prix du lait. A 334 €/t  en mai d’après le MMO, le prix s’est légèrement apprécié depuis janvier, de plus de 5 € en 5 mois. Il dépasse de plus de 40 € son niveau de l’an passé et bat ainsi un niveau record pour le mois d’avril.

Aux Pays-Bas, la collecte peine à retrouver ses niveaux de l’année passée. A 1,18 MT sur avril, elle enchaine un 5ème mois consécutif de baisse d’une année sur l’autre (-0,8% /2020). Dans le même temps, le prix garanti par la coopérative FrieslandCampina s’est lui nettement redressé  ce printemps. Après avoir oscillé entre 340 et 350 €/t d’août 2020 à février 2021, il a bondi à 360 €/t sur avril, puis 375 €/t sur mai.

Prix Pays-Bas FrieslandC

Au Danemark comme aux Pays-Bas, la saisonnalité du prix du lait demeure faible, mais l’orientation est nettement haussière ce printemps avec un prix qui s’établit à 373 €/t sur avril et mai d’après le MMO, soit une progression de +35 € par rapport à son niveau de janvier. D’une année sur l’autre, il  s’est apprécié de 24 €/t (+7%) alors qu’il comptait un retard de près de 11 € en janvier (-3%). Pour retrouver des prix aussi élevés dans le pays scandinave, il faut remonter à novembre 2018. La collecte reste globalement stable d’une année sur l’autre depuis le début d’année, à l’exception d’un mois de février en recul.

Collecte européenne à nouveau croissante

En somme la collecte de l’UE-27 enchaine un 2ème mois de croissance d’une année sur l’autre, avec +157 000 t, soit +1,2% /avril 2020. Elle a ainsi inversé la tendance après le recul sur janvier et février. Les grands producteurs que sont l’Allemagne et la France commencent à renouer avec des niveaux de collecte plus proches de leurs standards après leur décrochage marqué du début d’année, tandis que l’Irlande et nombre de pays secondaires de l’espace européen connaissent une croissance de leur collecte soutenue.

Variation collecte UE-27

Lait de vache » Marché des produits laitiers »

Évolutions contrastées des marchés laitiers

Très bien orientés sur le 1ertrimestre, les cours des ingrédients laitiers évoluent de manière contrastée depuis le mois d’avril. Si les prix restent élevés, on observe cependant quelques inflexions, notamment, en Océanie. Face à une demande internationale toujours ferme, le rétablissement progressif de la production laitière européenne améliore l’équilibre offre/demande d’autant que la production laitière demeure dynamique aux États-Unis et en Nouvelle-Zélande.

Poudre maigre : des cours toujours bien orientés

Le cours de la poudre maigre dans l’UE-27 a poursuivi sa progression en mai, atteignant 2 580 €/t à la fin du mois (+27% /2020). La situation est identique en France où la cotation ATLA a dépassé les 2 600 €/t fin mai (+29% /2020). La poudre maigre européenne demeure plus compétitive que la poudre océanienne (2 850 €/t en avril), dont le cours, déjà élevé, n’a que marginalement progressé en mai (+1% d’un mois sur l’autre), à 290 €/t (+26%/2020). Le cours des fabrications aux Etats-Unis a bondi en mai (+10% d’un mois sur l’autre) mais demeure encore le plus compétitif à 2 550 €/t (+48% /2020).

La hausse des cours s’explique par une demande internationale toujours ferme. Les principaux importateurs ont accru leurs achats sur les quatre premiers mois, Chine en tête (+36% /2020). En face, les disponibilités toujours limitées dans l’UE-27 sont partiellement compensées par une offre plus abondante aux États-Unis, qui peine cependant à satisfaire la demande.

Malgré des fabrications réduites, les exportations de l’UE-27 ont progressé de 5% au premier trimestre, les fabricants puisant dans leurs stocks. Celles des États-Unis affichent une hausse de 17% /2020 sur les 4 premiers mois, entraînant un recul des stocks de poudre maigre de -12% en deux mois.

Les volumes de ces deux exportateurs ont plus que compensé le recul de la Nouvelle-Zélande (-19% sur le 1er trimestre). Dans les prochains mois, les replis européen et océanien devraient se renforcer tandis que les États-Unis devraient encore accroître leurs parts de marchés, grâce à des fabrications dynamiques et des stocks conséquents.

Beurre : tassement des cours

Le rythme de progression du cours du beurre dans l’UE-27 s’est de nouveau ralenti en mai (+2% d’un mois sur l’autre) pour atteindre 4 120 €/t en fin de mois (+39% /2020). En France, il s’établit sur le marché spot à 4 340 €/t (+37% /2020) en dernière semaine de mai. En Océanie, il a chuté de -13% entre avril et mai à 4 200 €/t (+16 % /2020), retrouvant son niveau de février. Les prix élevés atteints en début d’année face à la concurrence européenne et les fortes hausses de la production de lait enregistrées dans le pays en mars et avril, malgré la baisse saisonnière, expliqueraient ce recul.

Dans l’UE-27, les fabrications sont ralenties (-2% /2020 sur le 1er trimestre), alors que la demande européenne est plutôt robuste du fait notamment d’achats des ménages toujours importants. Les exportations de beurre ont chuté de -15% /2020 sur le 1er trimestre.

Aux États-Unis, le niveau historique des stocks (175 000 t début mai, +3% /2020) pèse sur le marché. Après un léger recul des fabrications au 1er trimestre (-1% /2020), elles ont fortement chuté en avril (-18% /2020). La demande intérieure de beurre est visiblement moins ferme et les volumes trouvent preneur à l’export. Sur les 4 premiers mois de l’année, les envois ont été multipliés par 2, à 17 000 t tandis que les importations ont chuté. Après 3 mois consécutifs de hausse, le cours du beurre s’est replié en mai (-2% d’un mois sur l’autre) à 3 290 €/t.

Les exportations océaniennes de beurre ont rebondi en mars et affichent une légère hausse de +2% /2020, qui atténue le net fléchissement sur le 1er trimestre de -6% à 81 000 t. Les achats chinois de beurre ont fortement augmenté en avril et affichent une hausse de +12% /2020 sur les 4 premiers mois, à 56 000 t.

Marché des fromages toujours équilibré

Le cours de l’emmental est d’une grande stabilité en Allemagne (4 650 €/t en mai), tandis que celui du gouda, à 3 210 €/t en mai, s’est légèrement apprécié (+2% d’un mois sur l’autre et +4% en 5 mois). Le marché européen des fromages parait globalement bien équilibré avec des fabrications en hausse qui couvrent la demande intérieure et les débouchés extérieurs. Les exportations de l’UE-27 (sans prise en compte des envois vers le Royaume-Uni) ont progressé de +5% /2020 sur le 1er  trimestre.

A l’inverse, on observe une détente des cours en Nouvelle-Zélande et aux États-Unis. Le cours néozélandais s’est replié en mai de -2% d’un mois sur l’autre, à 3 633 €/t. Malgré des exportations en hausse de +16% /2020 sur le 1er trimestre, la progression de la production laitière doit peser sur les volumes. Aux États-Unis, le cours du cheddar a également cédé -2% d’un mois sur l’autre. Les fabrications ont été dynamiques sur les 4 premiers mois (+4% /2020) et pèsent sur les prix. Toutefois, la reprise de l’activité dans le Food service a relancé la demande intérieure et les exportations ont bondi en avril (+50% /2020), permettant une hausse de 11% sur les 4 premiers mois. Après 5 mois consécutifs de hausse, les stocks ont ainsi reculé en avril (-1% d’un mois sur l’autre) et repassent sous leur niveau de l’année dernière (-2%) tout en restant à des niveaux très élevés.

Lactosérum en poudre : ralentissement de la hausse des cours

En mai, le prix de la poudre de lactosérum s’est stabilisé à 1 020 €/t en France (+40% /2020), en hausse de 29% en 5 mois. Il a rejoint le haut niveau de début 2014, avant la seconde crise laitière. Aux États-Unis, le cours n’a progressé que de 2% d’un mois sur l’autre en mai, contrastant avec des hausses de 9% en moyenne sur les 7 derniers mois.

Les fabrications de poudre de lactosérum ont légèrement reculé aux États-Unis sur les 4 premiers mois (-0,5%/2020), malgré les fabrications fromagères croissantes, du fait du dynamisme des fabrications de concentrés de protéines sériques (+9% /2020 pour les WPC et +20% pour les WPI). Cette préférence pour les produits à plus forte teneur en protéines, très demandés sur les marchés intérieur et mondial, continue de maintenir la tension sur le marché du lactosérum en poudre.

La demande chinoise tire toujours les cours. Ses importations ont bondi de +60% en quatre mois à 268 000 t, essentiellement en provenance des deux principaux fournisseurs, l’UE-27 et les États-Unis.

Poudres grasses : évolutions contrastées

En mai, les cours de poudres grasses ont évolué de manière contrastée mais demeurent à des niveaux élevés. Ils se sont stabilisés en France, à 3 260 €/t (+26% /2020), et en Océanie (3 417 €/t, +38% /2020), mais ont poursuivi leur progression aux États-Unis (+3% d’un mois sur l’autre à 3 437 €/t) et dans l’UE 27 (+2% en un mois), à 3 200 €/t.

Les échanges internationaux ont été très dynamiques sur les premiers mois de l’année, signe d’une demande croissante dans les pays déficitaires qui a stimulé les fabrications dans les principaux pays exportateurs. Les importations chinoises ont poursuivi leur hausse sur les 4 premiers mois (+17% à 393 000 t).

La Nouvelle-Zélande a donc fortement accru ses expéditions sur le 1er trimestre (+11% /2020), l’UE-27 les a légèrement améliorées (+1%), tandis que les fournisseurs secondaires (Australie, Argentine et Uruguay) ont relancé leurs fabrications et leurs exportations grâce à la hausse de leur production laitière.

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