Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 363 Juillet/août 2024 Mise en ligne le 19/07/2024

Les disponibilités en lait de chèvre se sont encore tendues face au repli de la collecte en France, mais aussi chez nos fournisseurs européens. Si les transformateurs ont jusqu’ici préservé le marché domestique, plus porteur que les exportations de fromages, ils risquent de manquer de matière première au second semestre, faute de stocks de produits de report.

 

Pas de rattrapage de la collecte après le pic de mai

A 256,5 millions de litres au 1ersemestre, la collecte de lait de chèvre s’est repliée de 1,6% par rapport à 2018, soit près de 4 millions de litres. Certes, après un démarrage en très net recul (-3,2% /2018 en janvier) en raison de fourrages de médiocre qualité et d’un décalage des naissances, l’ampleur de la baisse s’est progressivement atténuée (-0,8% en juin). Mais le rattrapage attendu après le pic de collecte de mai n’a pas eu lieu et la récupération des volumes au 2èmesemestre semble compromise par des conditions climatiques estivales de nouveau particulièrement difficiles. Sécheresse et épisodes caniculaires ont fortement impacté les lactations et la production fourragère. Ainsi, alors que jusqu’en avril la pousse de l’herbe était globalement excédentaire, exception faite de certaines zones d’Occitanie et du Sud-Est, le déficit fourrager s’est petit à petit propagé sur la plupart du territoire durant l’été. Selon l’indicateur des rendements des prairies permanentes d’Agreste, la pousse cumulée en août a ainsi baissé de 18% par rapport à la période de référence.

Régionalement, les bassins historiques de production semblent souffrir toujours davantage, avec un repli de près de -4% en Nouvelle-Aquitaine, de -5% en Centre-Val-de-Loire et de -2% en Auvergne-Rhône-Alpes. La collecte est en revanche mieux orientée en Pays de la Loire (+2%) et Occitanie (+1%).

Des importations toujours en repli

A seulement 35 millions de litres au 1ersemestre, les importations de produits de report caprins se sont effondrées de 42% d’une année sur l’autre, soit une baisse de près de 32 millions de litres. Face au repli de 5% de la collecte espagnole en cumul à mai (-10,4 millions de litres), les disponibilités européennes sont devenues limitantes… et plus onéreuses  pour les transformateurs français. Le prix du lait espagnol, boosté par la demande des transformateurs nationaux, n’a en effet cessé de progresser depuis le début de l’année pour rejoindre le niveau français, avec une progression comprise entre +17% en janvier et près de +26% en juin. Au final, à 291 millions de litres au 1ersemestre, l’approvisionnement total des industriels français (collecte et importations) a ainsi chuté de 36 millions de litres (-11% /2018), retombant au niveau de 2014, année marquée par une pénurie de fromages de chèvre au dernier trimestre.

Des disponibilités insuffisantes pour maintenir les fabrications… et reconstituer les stocks

Le déficit d’approvisionnement des transformateurs a logiquement impacté les fabrications de produits laitiers caprins. A 48 600 t au 1ersemestre, la production industrielle de fromages de chèvre a baissé de 2% et seulement 6,7 millions de litres de lait de chèvre ont été embouteillés (-7% /2018). Seules les fabrications de yaourts sont restées croissantes, mais à un rythme ralenti (+2%) qui  contraste avec celui des années précédentes. En dépit de moindres disponibilités, les transformateurs ont réussi à fournir la demande domestique, toujours  dynamique. Selon Kantar Worldpanel, les achats de fromages de chèvre des ménages ont bondi de 2,7% en volume au 1ersemestre /2018, malgré un prix en hausse de 1,5%. Mais cette progression s’est faite au détriment des exportations qui, à 12 500 t au 1ersemestre, ont chuté de près de 17% d’une année sur l’autre (-2 500 t). La fourniture du marché intérieur devrait se tendre encore davantage au second semestre : les transformateurs n’ont pu reconstituer les stocks de caillé congelé nécessaires au maintien des fabrications du « creux » de collecte de fin d’année. A seulement 5 800 t fin juin, ils se sont effondrés de près de 50% d’une année sur l’autre, tombant à leur plus bas niveau enregistré par FranceAgriMer ces 20 dernières années.