Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 363 Juillet/août 2024 Mise en ligne le 19/07/2024

L’inflation alimentaire a certes ralenti sur les dernières semaines, mais les prix à la consommation demeurent élevés et pèsent sur la demande. Les modes de consommation ont évolué en deux ans avec plus de ventes en restauration et moins d’achats au détail. Sur les 10 premiers mois de 2023, les échanges français de viande bovine ont ralenti.

Ralentissement de l’inflation mais prix toujours soutenus

En novembre 2023, l’inflation en France a poursuivi son ralentissement. D’après l’INSEE, l’indice général français des prix à la consommation harmonisé (IPCH) était en retrait par rapport au mois précédent, à +3,8% sur un an (contre +4,5% en octobre 2023). Même constat pour l’alimentaire (+7,9% sur un an) et les viandes de bœuf et de veau (+3,8% sur un an), malgré la légère progression des indices sur un mois.

La décélération de l’inflation sur un an des prix alimentaires a été cependant limitée (+7,9% /2022 contre +8,0% un mois auparavant). Elle était plus marquée pour les viandes de bœuf et de veau (+3,8% /2022 contre +4,2% un mois auparavant). Depuis plusieurs mois, le phénomène de ralentissement de la hausse des prix est observé partout dans l’UE.

L’inflation a réduit les achats au détail en volume

Comme pour l’inflation générale en novembre 2023, le ralentissement de la progression sur un an des prix au détail dans les rayons alimentaires (et petit bazar) s’est confirmé. Elle a atteint en novembre +8,2% /2022 (contre +9,2% un mois auparavant).

Mais si la progression de l’inflation poursuit son ralentissement, les prix au détail restent bien plus élevés qu’avant le début de la période de hausse. Ainsi, l’inflation cumulée à 2 ans était toujours supérieure à +20% /2021 en novembre 2023 pour le 4ème mois consécutif.

D’après Circana, si cette progression des prix participe à la hausse en valeur des ventes au détail des produits de grande consommation et de frais libre-service (PGC-FLS) depuis plusieurs mois, elle pèse sur les ventes en volume. En cumul sur les 48 premières semaines de 2023, les ventes de PGC étaient en hausse en valeur par rapport à l’année dernière et à l’avant pandémie (+9% /2022 et +20% /2019), mais en baisse en volume (-3% /2022 et -1% /2019), en lien avec la baisse du pouvoir d’achat.

La question du pouvoir d’achat a les mêmes effets sur les achats au détail de viande bovine hachée avec, en corollaire, un phénomène de descente en gamme : les consommateurs reportant partiellement leur consommation de viande hachée depuis le frais vers le congelé. D’après Circana, sur les semaines 45 à 48, les ventes en valeur sur un an de bœuf haché surgelé ont connu une hausse supérieure (+8% /2022, mais +43% /2021) à celle du frais (+2% /2022, mais +19% /2021). En cumul sur les 48 premières semaines de l’année, le constat était le même : la hausse relative était plus forte pour la viande hachée surgelée (+20% /2022 et +35% /2021) que pour le bœuf haché frais (+8% /2022 et +13% /2021).

Report partiel de la consommation vers la restauration hors domicile

En RHD, la progression du chiffre d’affaires du secteur reste supérieure à celle des prix, reflétant le dynamisme du secteur. D’après l’INSEE, le chiffre d’affaires total de la restauration en France restait en nette progression en septembre 2023 (+9% /2022), hausse supérieure à l’inflation dans le secteur (+5% /2022). Même constat en cumul sur les trois premiers trimestre de 2023, avec une progression nette du chiffre d’affaires de la restauration en France (+12% /2022 et +29% /2019).

Sur la même période, la hausse des prix en restauration était plus limitée (+6% /2022 et +11% /2019).

Moins d’échanges de viande bovine pour la France

En octobre 2023, les échanges français de viande bovine ont été à nouveau en retrait, aussi bien du côté des importations (-8% /2022 à 31 000 téc) que des exportations (-4% à 19 000 téc).

Le constat est le même en cumul sur les 10 premiers mois de 2023 :

  • Les exportations françaises de viande bovine ont enregistré un recul conséquent, à 177 000 téc (-13% /2022 et -12% /2021), dont 45 500 téc vers l’Italie (-8% /2022) et 31 000 téc vers l’Allemagne (-8%). Parmi les destinations majeures, seul le débouché grec a résisté, mais par rapport au faible niveau de 2022 (= /2022 à 27 500 téc).
  • Côté importations, les flux ont été en repli par rapport à 2022, année dynamique sur le plan de l’import. D’après les Douanes françaises, ils ont atteint 299 000 téc (-6% /2022, mais +16% /2021).

Attention toutefois, les échanges sont affectés par des flux « parasites » avec le Royaume-Uni et les Pays-Bas depuis la mise en œuvre du Brexit. Des opérateurs néerlandais font dédouaner des viandes britanniques en France avant réexportation vers les Pays-Bas (cf. infra).

Consommation apparente en repli

Depuis avril dernier, la consommation calculée par bilan recule. D’après nos estimations, elle atteindrait 1,21 million de téc en cumul sur les dix premiers mois de 2023, en retrait par rapport aux années précédentes (-3% /2022 et 2021).

Sur la même période et sans correction des effets du Brexit, le taux d’import dans le disponible consommable en France était en léger retrait (25,0% en 2023 contre 25,6% en 2022).

Attention toutefois, les effets des éventuelles variations de stocks, importantes à certaines périodes, ne sont pas intégrés dans cette estimation et la lecture mensuelle ne doit pas être sur-interprétée.

A la suite de l’instauration des nouvelles procédures douanières entre l’UE et le Royaume-Uni en 2021 en lien avec le Brexit, les échanges français de viande bovine ont été affectés : plusieurs exportateurs britanniques font dédouaner leurs viandes en France afin de faciliter les procédures, avant de les réexpédier vers les Pays-Bas. Ces flux « parasites » augmentent artificiellement le commerce extérieur français. Après correction, le niveau d’import dans le disponible consommable sur les 10 premiers mois de 2023 serait inférieur : 22,7% en 2023 contre 23,4% en 2022.