Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 365 Octobre 2024 Mise en ligne le 21/10/2024
Viande ovine
Des cours européens élevés qui illustrent un manque d’agneaux
Les cotations en France, au Royaume-Uni, en Irlande et en Espagne restent bien au-dessus de leur niveau des années précédentes à l’automne 2024, ce qui s’explique par un marché particulièrement tendu : l’offre en viande ovine est modeste tandis que la demande à l’export semble se maintenir.
Le cours s’envole à 2 mois des fêtes de fin d’année
Depuis mi-août, le cours de l’agneau français a augmenté de façon saisonnière face à la diminution progressive des abattages à cette période de l’année. Le bas niveau d’offre, tant au niveau de l’origine France que de l’import, explique son niveau historiquement élevé. Le niveau d’achat en France reste modeste face à des prix de vente soutenus.
Le cours français prend de la hauteur
En semaine 40 de 2024 (se terminant le 6 octobre), la cotation a marqué le pas, à 9,56 €/kg soit -0,02 €/kg d’une semaine sur l’autre et +1,52 €/kg comparée à la même semaine en 2023. Le marché est relativement équilibré entre une offre et une demande toutes deux modestes.
L’IPAMPA ovin viande poursuit très progressivement sa baisse amorcée fin 2022 : il était en recul de -1% d’un mois sur l’autre en août 2024 et en repli de -3% /2023. L’indice énergie et lubrifiants diminuait de -6% d’un mois sur l’autre et de -16% d’une année sur l’autre tandis que l’indice engrais était en recul de -1% d’un mois sur l’autre et de – 9% /2023. L’indice aliments achetés était en repli de -1% d’un mois sur l’autre et de -6% /2023.
Les abattages français reculaient toujours en août
Selon Agreste, la production abattue de viande ovine était en recul de -5% d’une année sur l’autre sur les 8 premiers mois de 2024, à 50 000 téc, et de -13% comparé à la moyenne des cinq dernières années (2019-2023). Les abattages de réformes ont baissé de -9% en têtes et de -11% en volumes, du fait d’une légère baisse du poids moyen des carcasses (-0,6 kgéc) à 26,1 kgéc. Ceux des agneaux ont aussi diminué, de -4% en effectif et en volume, avec un poids moyens de carcasse à 18,4 kgéc.
La production française se replie et, accompagnée d’importations modestes, maintient le marché sous tension.
Il est difficile et trop tôt pour évaluer un effet de la FCO (3 et 8) sur les élevages ovins, mais celle-ci pourrait impacter la production ovine dans les mois à venir : la filière est particulièrement attentive aux approvisionnements pour Pâques 2025.
On ne peut malheureusement pas connaître les importations d’agneaux ni d’ovins adultes vivants en 2024 à cause de difficultés lors des remontées des données douanières. D’après les professionnels du secteur, les importations seraient au moins stables. À l’inverse, et malgré la baisse de production en France, les exports d’agneaux augmentent, de +5% sur 8 mois : la demande internationale en vif est forte et l’Espagne est concentrée sur le Maroc. Les envois de réformes reculent de -9% sur la période.
Les importations de viande ovine poursuivent leur baisse en août
Sur les 8 premiers mois de 2024, les importations françaises de viande ovine ont reculé de -5% d’une année sur l’autre, à 54 000 téc. Elles ont progressé en provenance de Nouvelle-Zélande (+14% /2023) et d’Espagne (+7%). En revanche elles baissaient nettement d’Irlande (-19%) et du Royaume-Uni (-7%), notamment à cause d’un repli de la production dans ces pays. En août, le repli est de -6% d’une année sur l’autre.
Le disponible français se replie franchement
Sur 8 mois en 2024, les abattages français étaient en repli d’une année sur l’autre, tout comme les importations et les exportations de viande ovine. Le disponible a ainsi reculé de -5% /2023 et de -13% comparé à la moyenne 2015-2019.
D’après les données du panel Kantar de FranceAgriMer, sur 9 mois en 2024, les achats des Français auraient reculé de -9% /2023 en volume alors même que le prix moyen pondéré de la viande ovine augmentait « seulement » de +1%.
Viande ovine » UE et monde »
Le cheptel néozélandais en route vers une nouvelle phase de recapitalisation
Alors que les abattages ovins avaient très bien débuté l’année en Nouvelle-Zélande, ceux-ci se replient nettement à partir de juin. L’île ayant subi des sécheresses répétées, son cheptel est cette année tombé à un bas niveau historique et la filière tente de limiter les abattages dans le but de le reconstituer.
Nouvelle-Zélande : les abattages poursuivent leur franche baisse en août
Après avoir augmenté de +6% sur les 5 premiers mois entre 2023 et 2024, la production ovine abattue en Nouvelle-Zélande a chuté en juin, juillet et août ramenant le cumul sur 8 mois à seulement 288 000 t, soit -2% /2023.
Sur cette période, le nombre d’agneaux abattus a augmenté de +4%, à 13 M de têtes, tandis que celui des réformes a reculé de -16%, à 2 M de têtes. L’amélioration des conditions météorologiques après de fortes sécheresses dans le Nord de l’île a engendré un recul des abattages sur les derniers mois étudiés : il est probable que les éleveurs entament une reconstitution de leurs troupeaux.
Malgré des abattages en légère baisse, les exportations de viande ovine ont augmenté de +1% /2023, à 296 000 téc sur 8 premiers mois de 2024. La demande chinoise en agneau néozélandais recule nettement (-24%), du fait à la fois d’une hausse de l’autosuffisance chinoise et de la compétitivité accrue de l’Australie sur ce marché. La Nouvelle-Zélande a donc réorienté ses envois, se concentrant notamment sur le Royaume-Uni (+59%) et l’Amérique du Nord (+42% vers les USA et vers le Canada et x2 vers le Mexique).
Royaume-Uni : le manque d’offre soutient la cotation
Le cours de l’agneau britannique n’a pas eu de creux estival prononcé en raison de son bas niveau d’offre : une baisse a bien eu lieu après la traditionnelle hausse en mai-juin mais le cours s’est ensuite stabilisé à un haut niveau pour la période considérée. En semaine 39, il se situait à 7,62 €/kg, soit +1,24 €/kg comparé à 2023.
La production britannique de viande ovine a totalisé 170 000 t sur 8 mois en 2024, en baisse de -9% /2023. Cela s’explique par un repli de -15% des abattages de réforme et de -8% des abattages d’agneaux (soit -822 000 têtes au total). Comparée à la moyenne 2015-2019, elle recule de -9%.
Ce repli de la production est principalement dû à la contraction du cheptel reproducteur entre fin 2022 et fin 2023 (maladies, mauvaises conditions météo…). Ce repli a été récemment confirmé par l’enquête de juin 2024 (Defra) qui indique un déclin de -6% /2023 du cheptel de reproductrices britanniques et une baisse de -11% du nombre de primipares. Les prix élevés ont probablement incité les éleveurs à abattre davantage d’agnelles et d’ovins adultes au printemps.
Le temps pluvieux a eu un impact sur la condition des animaux, avec un nombre important d’agneaux mal finis présentés aux abattoirs et cela pèse sur les prix.
Les importations britanniques de viande ovine ont bondi pour tenter de combler ce manque de production, de +46% /2023 sur 8 mois en 2024, avec +54% en provenance de Nouvelle-Zélande et +78% d’Australie mais -22% d’Irlande.
Face à la nette baisse de la production, et malgré des importations dynamiques, les exportations britanniques de viande ovine ont reculé de -7% /2023 sur la période, à 49 000 téc. La baisse la plus forte est enregistrée vers la république d’Irlande (- 84%/2023 soit -3 500 téc) : l’Irlande du Nord a en effet vendu davantage vers le reste du Royaume-Uni. Les exportations du Royaume-Uni se tenaient ainsi -7% sous leur niveau d’avant Brexit et pandémie de Covid-19 (moyenne 2015-2019).
Des évolutions croissantes des ventes d’agneau au détail ont été enregistrées ces derniers mois au Royaume-Uni (+4% en volumes de début juin à début septembre 2024 /2023), réduisant d’autant le disponible à l’export.
Irlande : la production reste en recul
En semaine 39 de 2024, la cotation de l’agneau de nouvelle saison irlandais était toujours stable, à 7,45 €/kg et en hausse de +1,10 €/kg comparée à la même semaine en 2023.
Après avoir augmenté de +2% entre 2022 et 2023, la production irlandaise de viande ovine a perdu -7% /2023 sur 8 mois en 2024. Les effectifs d’agneaux abattus ont baissé de -7% /2023 et ceux de réformes de -11%. Comme au Royaume-Uni, la baisse du cheptel reproducteur irlandais (-2,5% entre fin 2022 et 2023) explique cette baisse de la production.
Sur 7 mois en 2024, les exportations de viande ovine irlandaise ont baissé de -14% à 29 000 téc dont -15% vers la France et -3% vers le Royaume-Uni. Associée à la baisse de la production nationale, la concurrence de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande sur le marché européen explique ce repli des envois.
Espagne : la filière mise sur les envois d’ovins vifs
Le cours de l’agneau espagnol a débuté sa traditionnelle hausse et s’établissait à 8,93 €/kg en semaine 39, soit +1,17 €/kg au-dessus de son niveau de 2023.
Après une baisse de -11% entre 2022 et 2023, la production de viande ovine espagnole a poursuivi sur cette tendance en 2024. Sur les 7 premiers mois de l’année, elle n’a totalisé que 59 000 téc, soit -10% /2023. Le nombre d’agneaux abattus a baissé de -6% et celui des réformes de -32%, avec une probable volonté de recapitaliser après trois années de sécheresse (état d’urgence levé en juin 2024).
Avec un disponible nettement diminué, la tendance baissière des exports de viande ovine se poursuit, à l’avantage des envois de vifs.
Sur ces 7 mois, les exportations de viande ovine espagnole reculaient en effet de -6% /2023, à 27 000 téc, principalement du fait d’un arrêt des envois vers Oman et d’une forte baisse vers les Émirats Arabe Unis (-79%) et Israël (-60%), que n’a pas contrebalancé la hausse vers la France (+5%) et la réouverture du marché algérien (fermé depuis 2017). Sur la même période, les envois d’agneaux vivants ont au contraire augmenté, de +11% /2023, avec des envois vers le Maroc multipliés par quatre. Parallèlement, les envois de réformes ont bondi de +69%, là aussi via une explosion des envois en direction du marché marocain (x11).