Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 362 Juin 2024 Mise en ligne le 24/06/2024
Viande ovine
Les élections législatives font exploser le prix de l’agneau britannique
En moyenne de mars à avril 2024, la cotation en euros de l’agneau lourd britannique a surpassé celle de l’agneau français. La nette baisse de la production au Royaume-Uni tire le cours vers le haut et ce, malgré l’explosion de leurs importations de viande ovine. L’appréciation de la livre face à l’euro, en réaction aux élections législatives anticipées en France, accentue l’augmentation du prix de la viande britannique importée en France.
Le commerce reste peu dynamique et les cours baissent
Le cours de l’agneau français poursuit sa baisse saisonnière sous l’effet d’achats des consommateurs en net repli. L’offre reste très modeste, tant au niveau de la production française que des importations de viande ovine, ce qui explique le maintien du cours à un niveau historiquement élevé. L’Aïd el Kébir relance le marché en semaine 24 et fait ponctuellement remonter la cotation.
Le cours poursuit sa traditionnelle baisse
En semaine 24 de 2024 (se terminant le 16 juin), la cotation atteignait 9,51 €/kg soit +1,33 €/kg comparée à la même semaine en 2023 et +1,59 €/kg comparé à celle de 2022. Bien que l’offre reste modeste, les achats le sont aussi, ce qui pèse traditionnellement sur la cotation à cette période de l’année. Mais les sorties d’agneaux et les importations, en repli par rapport aux années passées, expliquent le niveau historiquement élevé de la cotation. L’Aïd el Kébir, les 15 et 16 juin soit en semaine 24, redynamise le marché et conduit au traditionnel sursaut de la cotation contrebalançant la tendance baissière.
Très dépendant de l’indice des prix des carburants, l’IPAMPA ovin viande a poursuivi sa légère baisse amorcée fin 2022 et était stable d’un mois sur l’autre en avril 2024. À 131,0, il est en repli de -4% /2023. L’indice énergie et lubrifiants diminuait de -1%/ mars 2024 et augmentait de +3% d’une année sur l’autre tandis que l’indice engrais était stable d’un mois sur l’autre et en retrait de -20%/2023. L’indice aliments achetés reculait quant à lui de -1% d’un mois sur l’autre et de -12% /2023. Malgré quelques améliorations, ils restent à des niveaux historiquement élevés.
Abattages en net repli sur les quatre premiers mois de 2024
Selon Agreste, la production abattue de viande ovine était en recul de -6% d’une année sur l’autre sur les quatre premiers mois de 2024, et de -12% comparé à la moyenne des cinq dernières années (2019-2023). Les abattages de réformes ont baissé de -14% en têtes et en volume, avec un poids moyen de carcasse à 26,4 kgéc (stable comparé à 2023). Ceux des agneaux ont aussi diminué, de -3% en effectif et -4% en volume, signe d’une baisse des poids moyens de carcasse (de 18,2 à 18,0 kgéc entre 2023 et 2024).
La production française se replie et, accompagnée d’importations modestes, maintient le marché sous tension. Les abatteurs sont en forte concurrence pour acquérir des agneaux.
Les importations d’agneaux vivants se replient en ce début d’année 2024, en baisse de – 2% sur 4 mois /2023. Les agneaux espagnols sont insuffisamment nombreux cette année pour fournir l’Aïd, selon les professionnels de la filière.
Les importations de viande ovine britannique et irlandaise reculent nettement
Sur les quatre premiers mois de 2024, les importations françaises de viande ovine ont reculé de -5% d’une année sur l’autre, à 28 000 téc : elles ont progressé en provenance de Nouvelle-Zélande et d’Espagne, de respectivement +14% /2023 et de +8%, mais ces hausses n’ont su contrebalancer les nettes baisses d’Irlande (-10%) et du Royaume-Uni (-9%), engendrées par un repli de la production chez ces derniers.
Le disponible se replie d’une année sur l’autre
Sur 4 mois en 2024, les abattages français sont en repli d’une année sur l’autre, tout comme les importations et les exportations de viande ovine. Le disponible recule de -4% /2023 et de -10% comparé à la moyenne 2015-2019.
Viande ovine » UE et monde »
L’Espagne concentre ses exports de vifs vers le Maroc
Soumis à plusieurs années de forte sécheresse, l’élevage ovin espagnol est souffrant et les exportations, de viande comme de vifs, en pâtissent. Le gouvernement marocain octroie depuis l’an passé une prime à ses engraisseurs qui importent des ovins vifs, faisant le bonheur des exportateurs espagnols, au détriment du marché français, 1er client de l’Espagne, qui a pourtant besoin d’agneaux.
Espagne : des exports de vifs en repli et concentrés sur le Maroc
Le cours de l’agneau espagnol oscille légèrement au-dessus des 8 €/kg depuis plusieurs semaines, après avoir légèrement diminué en début d’année. En semaine 23, il s’établissait à 8,33 €/kg, soit + 1,09 €/kg au-dessus de son niveau de 2023. Ce cours élevé illustre une offre toujours en repli.
Après une baisse de -11% entre 2022 et 2023, la production de viande ovine espagnole a poursuivi sa diminution début 2024 : sur 3 mois, à 24 000 téc, elle reculait de -11% /2023. Le nombre d’agneaux abattus baissait de -7% et celui des réformes de -34%.
Avec un disponible nettement diminué, la tendance baissière des exports de viande ovine comme de vifs se poursuit début 2024. Sur les quatre premiers mois, les exportations de viande ovine espagnole reculaient en effet de -7% /2023, à 15 000 téc, principalement du fait d’un arrêt des envois vers Oman et d’une forte baisse vers les Emirats Arabe Unis (-85%) et l’Italie (-10%), qui n’ont pas contrebalancé la hausse vers la France (+11%).
Sur la même période, les envois d’agneaux vivants ont nettement chuté, de -9% /2023 à 458 000 têtes. Les nettes baisses vers le Portugal (-23 000 agneaux), la Jordanie (-40 000), la Hongrie (- 47 000), la France (-31 000), l’Arabie Saoudite (-22 000) et l’Italie (-34 000) n’ont pas été compensées par la forte hausse vers le Maroc (+137 000 têtes). Parallèlement, les envois de réformes ont plus que doublé, atteignant 69 000 têtes, essentiellement en direction du marché marocain.
Royaume-Uni : une cotation historiquement élevée
Le cours de l’agneau britannique a entamé sa baisse saisonnière : en semaine 23, il se situait à 9,49 €/kg, soit +1,64 €/kg comparé à 2023 et +1,50 €/kg /2022.
La production britannique de viande ovine a totalisé 108 600 t sur les quatre premiers mois de 2024, en baisse de -6% d’une année sur l’autre. Cela s’explique par un repli de -16% des abattages de réformes (-110 000 têtes) et de -8% des abattages d’agneaux (soit -368 000 têtes). Comparée à la moyenne 2015-2019, elle recule de -4%. Les sorties des agneaux de nouvelle saison sont retardées, expliquant cette baisse de production. Les importations de viande ovine ont par ailleurs continué de croître vivement, illustrant la mise en place des accords commerciaux avec la Nouvelle-Zélande et l’Australie (printemps 2023). Elles ont ainsi progressé de +48% /2023 sur 4 mois en 2024, avec +68% en provenance de Nouvelle-Zélande et +63% d’Australie mais -13% d’Irlande. Malgré des importations dynamiques, les exportations britanniques de viande ovine ont reculé de -9% /2023 sur la période, la production s’étant affaiblie. Elles ont progressé de +6% vers la France mais se sont repliées de -14% vers l’Allemagne. Elles se tenaient ainsi -4% sous leur niveau d’avant Brexit et pandémie de Covid-19 (moyenne 2015-2019). Les élections législatives anticipées en France ont provoqué une baisse de l’euro face à la livre sterling, autre facteur désavantageant les exportations britanniques vers la France. Des évolutions positives des ventes d’agneau au détail ont été enregistrées ces derniers mois au Royaume-Uni, aidées par une période de forte activité du fait des fêtes religieuses (+4% en volumes de mi-février à mi-mai 2024 /2023), ce qui réduit d’autant le disponible à l’export.
Irlande : l’offre et les exportations poursuivent leur baisse
En semaine 23 de 2024, la cotation de l’agneau de nouvelle saison irlandais était à 9,20 €/kg, soit +1,45 € /2023 et +0,85 €/ 2022. Comme au Royaume-Uni, le manque d’offre face à une demande dynamique explique ce niveau de prix, en plus des cotations élevées chez les principaux clients de l’Irlande (France, Royaume-Uni, …).
Après avoir fléchi de -1% /2022 en 2023, les abattages d’ovins irlandais ont perdu -6% /2023 sur les 4 premiers mois de 2024. Les effectifs d’agneaux abattus ont baissé de -5% /2023 et ceux de réformes de -8%. La production de viande ovine en volume a perdu -6%, à 21 400 téc, mais cela reste un niveau soutenu, +5% plus élevé que la moyenne des cinq dernières années sur 4 mois cumulés. Les professionnels avaient peur de manquer d’agneaux pour l’Aïd el-Kébir, mi-juin.
Sur quatre mois 2024, les exportations de viande ovine irlandaise ont baissé de -13% à 17 000 téc dont -8% vers la France mais +7% vers le Royaume-Uni. La concurrence sur le marché européen de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande et du Royaume-Uni, ainsi que la baisse de la production nationale, en sont les principales causes.
Nouvelle-Zélande : des envois concentrés sur le Royaume-Uni et l’Amérique du Nord
Après avoir augmenté de +1% entre 2022 et 2023, la production ovine abattue en Nouvelle-Zélande a gagné +6% d’une année sur l’autre, à 192 000 t sur les quatre premiers mois de 2024. Le nombre d’agneaux abattus a augmenté de +14%, à 8,6 M de têtes, tandis que celui des réformes a reculé de -19% à 1,3 M de têtes.
Les exportations de viande ovine sont aussi en hausse : +2% /2023, à 172 000 téc. Sur ces quatre premiers mois de 2024, la demande chinoise en agneau néozélandais recule nettement (-21%), du fait à la fois d’une hausse de l’autosuffisance chinoise et de la compétitivité accrue de l’Australie sur ce marché. La Nouvelle-Zélande a donc réorienté ses envois, se concentrant notamment sur le Royaume-Uni (+58%) et l’Amérique du Nord (+46% vers les USA, +42% vers le Canada et x7 vers le Mexique).