Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 363 Juillet/août 2024 Mise en ligne le 19/07/2024

L’orientation des marchés des produits laitiers demeure positive en ce début d’année 2021. Si la crise sanitaire est toujours présente dans une grande partie du globe, les conséquences macro-économiques sont encore limitées, permettant un maintien de la consommation.

Sans savoir si l’impact économique de la crise de la Covid-19 a été évité ou est simplement retardé, les transactions sur les produits laitiers s’effectuent encore souvent à court terme, mais affichent des tendances haussières en ce début 2021. Les très bons résultats sur la plateforme Global Dairy Trade depuis décembre exercent un effet d’entraînement à la hausse de la majorité des commodités laitières.

Dans l’UE-27, la bonne tenue de la consommation en produits laitiers, moins impactée que prévu au début de la crise, et le ralentissement de la croissance de la collecte semblent jouer en faveur d’une fermeté des cours, qui bénéficient en début d’année d’un avantage comparatif vis-à-vis des produits océaniens.

La production laitière en Océanie paraît hésitante à mi-campagne, ce qui pourrait soutenir les prix sur de nombreux produits, d’autant plus si la Nouvelle-Zélande continue de miser sur les poudres grasses comme en 2020.

Aux États-Unis, l’équation s’articule autour de la poursuite des achats de produits alimentaires de l’État fédéral ainsi que de la reprise du Food service pour le fromage et le beurre ; autour de la demande asiatique et mexicaine pour la poudre maigre.

Beurre : des échanges en recul

La cotation ATLA du beurre  sur le marché spot se rapproche lentement de son niveau de 2020. En gagnant 200 €/t sur les 5 premières semaines de l’année, pour atteindre 3 570 €/t début février, elle n’est plus que 4% sous le niveau pré-crise Covid-19 de 2020.

Les cours ont également rebondi en janvier dans l’UE-27 (+2% d’un mois sur l’autre) à 3 430 €/t (-6% /2020). Début février, les enchères de Global Dairy Trade ont terminé en hausse pour la 5ème fois d’affilée et les prix néozélandais ont rattrapé puis dépassé les cours européens en janvier 2021, orientant la demande vers les produits de l’UE-27.

Cette hausse des cours s’explique notamment par des disponibilités limitées sur le marché international. Dans l’UE-27, les fabrications de beurre sont dans leur creux saisonnier, même si en progression de plus de +4,5% /2019 entre septembre et novembre. La hausse des exportations européennes sur les 11 premiers mois ne compense pas le recul des envois néozélandais en 2020 (-8% /2019), notamment au dernier trimestre. Le Royaume-Uni et l’Inde ont également réduit leurs expéditions.

Cette offre limitée fait face à une demande qui ne faiblit pas, entre la consommation intra-UE et la demande à l’export en provenance notamment des pays musulmans en préparation du Ramadan qui débutera en avril, ainsi que de la Chine et de la Russie. Et malgré le recul des achats états-uniens, 3ème importateur mondial, sur le dernier trimestre 2020.

Car à l’opposé, les cours ne cessent de reculer depuis juin 2020 aux États-Unis. En janvier ils ont atteint en moyenne 2 975 $/t (2 445 €/t) le plus bas niveau depuis 2019, si l’on excepte la chute en avril 2020 au début de la crise sanitaire.

L’année a été pourtant positive en termes de consommation de beurre aux États-Unis, en hausse de 2% /2019 sur les 11 premiers mois, les achats au détail ayant plus que compensé le recul des ventes en restauration. Mais les fabrications de beurre y demeurent élevées, tirées par une collecte toujours dynamique, mais également des taux de matière grasse du lait au plus haut. Sur le dernier trimestre, la hausse des fabrications atteint +6% /2019 et permet à la production annuelle d’atteindre un nouveau record à 962 000 t (+6% /2019 et +8% /2018). Les stocks ont également gonflé pour dépasser, fin décembre, de +50% leur niveau de 2019.

Poudre maigre : un marché tendu

La cotation ATLA a gagné 150 €/t en un mois, pour atteindre début février 2 380 €/t (-11% /2020), son meilleur niveau depuis fin février 2020. Le cours européen a également progressé pour le 2ème mois consécutif et s’établit à 2 270 €/t (+12% /2020) en janvier.

Si les fabrications dans l’UE-27 se sont accélérées au 2nd semestre 2020 et ont progressé de +7% /2019 entre septembre et novembre, les stocks européens demeurent faibles alors que la demande internationale reste très présente. Les envois européens ont reculé par rapport à 2019 (écoulement des stocks d’intervention), mais signent leur 2ème plus haut niveau historique.

Le cours de la poudre maigre néozélandaise est également orienté à la hausse, pour atteindre 2 629 €/t en janvier, son plus haut niveau depuis février 2020. Mais elle reste bien plus chère que ses concurrentes directes sur le marché international. Les exportations néozélandaises ont affiché un repli en 2020 (-4,5% /2019) et le pays a perdu des parts de marché en Chine au profit de l’Australie et des États-Unis.

La poudre maigre étatsunienne demeure toujours la plus compétitive, notamment grâce à des fabrications et des stocks en hausse (+4,5% /2019) en 2020. Les exportations étatsuniennes ont conservé leur dynamisme tout au long de l’année 2020 (+16% /2019) et en partie compensé le retrait de l’UE-27 et de la Nouvelle-Zélande.

Fromages : l’UE anime les marchés

Dans l’UE-27, les cours des fromages ont prolongé leur relative stabilité pour le 6ème mois d’affilé, l’emmental UE oscillant entre 4 800 et 4 880 €/t et le gouda allemand restant fixé à 3 080 €/t. La progression des fabrications dans l’UE-27 s’est poursuivie entre septembre et novembre (+1,8 /2019). Mais le rythme a ralenti sur les derniers mois de l’année notamment en France et en Allemagne, les volumes de lait étant orientés vers le beurre et la poudre maigre. Outre-Rhin, des usines de fromages ne tourneraient pas à plein régime faute de lait. La croissance de la production européenne en 2020 (+1,4% /2019 sur l’année effet bissextile neutralisé) a alimenté une hausse des exportations qui ont atteint un nouveau record sur les 11 premiers mois de l’année (+2% /2019).

Ces envois ont plus que compensé le retrait de la Nouvelle-Zélande sur le marché international en 2020 (-2,4% /2019), faute de disponibilités . En fin d’année 2020, les évolutions chaotiques de la production laitière ont pu inciter les acheteurs à sécuriser des volumes, tirant les prix à la hausse en janvier, à plus de 4 000 €/t (+1% /2019).

La situation des fromages n’est toujours pas stabilisée aux États-Unis. Après avoir chuté de 37% entre octobre et décembre, le cours du cheddar étatsunien a rebondi en janvier, notamment porté par les annonces du 5ème volet d’aide alimentaire à travers les Food Box. Entre mi-janvier et avril 2021, 1,5 milliard de dollars seront consacrés à l’achat de produits alimentaires, dont produits laitiers  (beurre, fromages, lait liquide et yaourts), pour soutenir la consommation.

Cette aide est la bienvenue car les fabrications de fromages ont atteint un nouveau record aux États-Unis en 2020, à 4,77 millions de tonnes (+0,4 /2019). Or, la demande intérieure a été impactée par les restrictions sanitaires touchant le food service et n’a pas suivi cette tendance haussière. Elle devrait au mieux être stable sur l’année. Les volumes exportés ont connu des variations très importantes en 2020 en fonction de l’évolution des cours, mais sont en très léger recul au total sur l’année (-1% /2019). En conséquence les stocks ont gonflé et atteint un nouveau record pour une fin d’année à 634 000 t (+6%/2019) fin décembre.

 

Lactosérum : des cours portés par la Chine

Les cours du lactosérum en poudre poursuivent leur progression et dépassent les 800 €/t, aussi bien aux États-Unis qu’en Europe, retrouvant leur haut niveau de début 2019.

La Chine demeure le principal acteur du marché, avec des importations qui ont atteint un nouveau record en 2020 (622 000 t). Ces achats s’expliquent notamment par la reconstitution du cheptel porcin, fortement réduit en 2019 par la fièvre porcine africaine, et par l’accord commercial signé avec les États-Unis en janvier 2020, engageant la Chine à augmenter fortement ses achats de produits agricoles étatsuniens. Mais, bien que la modernisation des exploitations porcines chinoises tire la consommation de poudre de lactosérum, les volumes importés par l’Empire du Milieu paraissent très importants au regard d’un cheptel qui n’a pas encore retrouvé ses effectifs d’avant crise. La volonté de profiter de prix relativement peu élevés en 2020 pour constituer des stocks, pourrait expliquer une partie des achats chinois et doit être prise en compte pour estimer la demande en 2021.