Sécheresse et fortes chaleurs ont donné un coup d’accélérateur à la décapitalisation, tant en élevage laitier qu’allaitant. L’offre en gros bovins finis reste toutefois très limitée en France ce qui permet de maintenir les cours à des niveaux historiquement hauts et sur une pente légèrement ascendante. Mais ces prix ne permettent pas toujours de couvrir l’ensemble des coûts de production qui flambent.
La décapitalisation allaitante commence à affecter la production
Le recul du cheptel allaitant s’est encore accéléré en début d’été. Au 1er août, le nombre de vaches allaitantes présentes en France était en recul de -3,1% /2021, contre -3,0% au 1er juin ou -2,7% au 1er janvier. Cette accentuation de la baisse a surtout été le résultat d’une forte chute des entrées de génisses dans le troupeau de vaches : -7% en juin /2021 et -8% en juillet alors que les réformes ne se sont pas accélérées (-1% en juin et -5% en juillet). Les effectifs de génisses de 24 à 36 mois étaient par ailleurs en repli de -1,7% au 1er août, une baisse moindre qu’au 1er juin (-2,3%), mais qui conduira à un nouveau recul des entrées dans les mois qui viennent.
La décapitalisation qui dure maintenant depuis la fin 2016 commence à affecter les abattages. D’après l’indicateur hebdomadaire de Normabev, le nombre de vaches allaitantes abattues sur les semaines 31 à 35 a reculé de -4% /2021, et celui de génisses de type viande de -1%. Le poids moyen en baisse de -1,2% pour les vaches suggère une moins bonne finition dans un contexte de sécheresse et de cherté des aliments achetés. Le poids moyen des génisses était stable sur la même période.
Accélération de la décapitalisation laitière
Entre mars et mai, la hausse continue du prix du lait dans un contexte de prix élevé de l’aliment avait poussé les éleveurs à conserver un peu plus de vaches en maximisant l’alimentation au pâturage. Mais les conditions caniculaires et sèches de l’été ont limité la pousse de l’herbe et incité certaines à ajuster le cheptel. Ainsi, le nombre de vaches laitières était en chute de -1,8% /2021 au 1er août, contre -1,3% au 1er juin. Celui de génisses laitières âgées de 18 à 36 mois étaient en baisse de -4,5% /2021, de quoi fortement limiter les entrées dans le cheptel prochainement.
En août, les réformes laitières ont été nombreuses, suggérant une nouvelle accélération de la décapitalisation. Sur les semaines 31 à 35, les abattages de vaches laitières étaient en hausse de +3% /2021. Le poids moyen en baisse de -0,8% /2021 témoigne d’une moins bonne finition liée au manque de fourrages.
Cotations en hausse pour les vaches allaitantes, stables pour les vaches laitières et JB
Sur les semaines 31 à 35, le nombre total de vaches abattues (laitières et allaitantes) était finalement stable par rapport à l’an dernier. Mais les baisses dans les autres catégories (-7% pour les JB viande et -12% pour les JB lait) ont conduit à une offre un recul de -3% /2021 pour l’ensemble des gros bovins.
Cette offre restreinte a soutenu la hausse des prix. La vache U standard cotait 5,63 €/kg de carcasse en semaine 35, soit 11 centimes de plus qu’en semaine 30. Elle se situait par ailleurs bien au-dessus (+17%) de la cotation 2021 qui incluait alors les SIQO (Label rouge principalement).
Depuis juillet, FranceAgriMer publie des cotations SIQO sur un pas de temps mensuel. Celle de la vache de type viande tous poids toutes races de conformation U= était à 5,77 €/kg de carcasse. La valeur d’août n’était pas encore sortie lors du bouclage. Toutes les cotations sont à retrouver sur le site Visionet de FranceAgriMer.
Les cotations des vaches laitières sont restées globalement stables ces dernières semaines. La cotation de la vache laitière P+, à 4,89 €/kg de carcasse en semaine 35, dépassait de +47% son niveau de 2021.
Les cotations des jeunes bovins sont restées relativement stables tout l’été. A 5,29 €/kg de cacrasse en semaine 35, celle du JB U dépassait de +27% son niveau de 2021. Le JB R cotait 5,16 €/kg (+31% /2021) et le JB O 4,96 €/kg (+43%).
Des charges en très forte hausse
Les évolutions des prix des animaux finis sont à mettre en regard de leurs prix de revient qui a considérablement augmenté du fait de la flambée des matières premières. L’Institut de l’Élevage calcule pour l’interprofession bovine un prix de revient sur une base semestrielle pour chaque catégorie de bovin. Au premier semestre 2022, il était de 5,82 €/kg pour la vache de type viande (+72 centimes pour les animaux label rouge), et de 5,64 €/kg pour les jeunes bovins de type viande. Ces prix de revient seront sans doute encore plus élevés au second semestre étant donnée l’évolution actuelle des prix des intrants.
En juillet 2022, l’IPAMPA viande bovine (indice des prix d’achat des moyens de production agricoles, base 100 en 2015) s’établissait à 136,9, en très léger recul par rapport à juin grâce à un apaisement momentané du prix des carburants, mais surtout en très forte hausse depuis deux ans (+21% /2021 et +32% /2020). L’indice des prix des aliments achetés était supérieur de +28% /2021 et +44% /2020, celui des énergies et lubrifiants de +56% /2021 et +97% /2020 et celui des engrais et amendements de +86% /2021 et +135% /2020.
La sécheresse et les vagues de chaleur ont fortement impacté la productivité des prairies
D’après l’indicateur ISOP d’Agreste, la production cumulée des prairies permanentes depuis le début de l’année jusqu’au 20 août était inférieure de -31% à celle de la période de référence 1989-2018. La sécheresse extrême et les vagues de chaleur exceptionnelles enregistrées depuis mai ont en effet fortement réduit la pousse de l’herbe.
Alors que selon Arvalis ou Tallage-Stratégie Grains, les rendements des céréales à paille n’ont pas été aussi médiocres que ce qu’on aurait pu craindre, les inquiétudes demeurent sur la production de maïs fourrage, car la floraison semble avoir été très affectée par les épisodes caniculaires du début d’été, tandis que la sécheresse a ensuite affecté la croissance malgré des orages épars.